Peut-être en
raison de sa "gémellité zodiacale",
Paul Gandriau est attiré par des manières contradictoires:
d'une part, la nécessité de donner de l'importance
au dessin, au graphisme maitrisé, et d'autre part, le
désir d'une pratique picturale libérée
de la contrainte formelle.
Culturellement, cet intérêt
pour le premier point est venu entre autres avec l'étude
du Classicisme, plus linéaire, attaché aux limites
formelles, aux plans dictincts et de façon plus contemporaine
et plus évidente avec la bande dessinée.
Quant au second point, on
y retrouve l'essence du Baroque qui est plus pictural, qui refuse
les contours, à la recherche du relationnel et d'une
unité indivisible et de manière plus éclatante
et systématique avec l'art informel contemporain.
En 2003, l'intuition d'une
synthèse à débouché sur une accélération
de la production. L'oeuvre s'enrichit, en 2004,2005 et les années
suivantes un nombre important de toiles seront réalisées
par l'artiste qui affine sa technique dans la "déconstruction
reconstruction".
Les différentes
étapes du travail effectué en peinture acrylique
sur toile se succèdent comme suit :
- D'abord,
un travail de dessin, à partir de supports visuels aux
thèmes variés: paysages, végétaux,
personnages, animaux, variations imaginaires dans lesquelles
l'humour est très souvent sous-jacent.
- Arrive ensuite
une opération de "déconstruction" par
fragmentation de formes qui tendent vers l'abstraction, à
l'instar du cubisme analytique de Picasso.
- Ces formes
fermées abstraites sont alors peintes en aplat, puis
entourées d'un cerne noir qui les valorise dans l'esprit
de l'époque des "plongeurs" de Fernand Léger,
le promoteur du contraste plastique.
- Survient
alors le stade de "reconstruction" qui implique l'espace
formel ouvert restant par diverses opérations : un travail
de mélange et de superpositions de couleurs imbriquées
au couteau et une finition de nature pointilliste dans laquelle
le blanc réservé donne naissance au scintillement
de la lumière dans lequel excellait l'impressionnisme.
- Depuis 2008,
le processus s'est enrichi de l'agrégat de fragments
traités en volume complexifiant le résultat final.
L'intuition
de cette synthèse est venue en partie d'une transposition
issue du domaine biologique. L'exemple du liquide sanguin, qui
est d'apparence unitaire, constitué de globules rouges
et de leucocytes, cellules formellement délimitées,
baignant dans le plasma, magma informel, a conduit à
cette analogie de construction plastique.
Dans un autre
domaine, les mécanismes psychophysiologiques de la vision
nous montrent que dans la perception du monde qui nous entoure,
on sélectionne, sans doute en partie subjectivement,
des éléments bien définis, réels,
alors que les espaces restants, non perçus, tendent vers
un remplissage flou relevant de l'abstraction.
Au niveau de
la démarche, la succession d'un travail plus construit,
presque besogneux, puis d'une gestuelle plus spontanée,
libératrice, impliquant d'abord une logique plus intellectuelle,
suivie d'une activité plus intuitive, participe de la
synthèse de la dualité évoquée plus
haut.
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